Depuis quelques semaines, j’ai une nouvelle activité : je donne des cours de français à des enfants francophones. Je suis là en renfort de la « maîtresse principale » dans sa classe de dix enfants d’environ 8 ans. Je dois dire qu’après quelques séances, j’apprécie l’ambiance « on m’a piqué ma gomme » et « mathiiiiilde, est-ce que je peux aller aux toilettes ». Mais au début, c’était la panique.Je suis toujours en train d’attendre mon permis de travail. Comme j’ai encore quelques semaines devant moi avant de le recevoir, quoi de mieux qu’un peu de volunteering ? C’est l’idéal pour parfaire mon expérience américaine. Je suis tombée un jour par hasard sur une annonce pour un poste de prof de français pour enfants. Parmi mes jobs d’étudiante, entre fromagère, vendeuse de fringues de sport et distributrice de Lille+, j’avais aussi fait prof (NB : j’ai tout de même appris à quelqu’un que Charles de Gaulle Etoile n’était pas seulement une station de métro). J’envoie ma candidature et je suis contactée quelques semaines plus tard pour un entretien un lundi matin, 9 heures (et mon petit déj, je le prends aux aurores ?!). Avant d’y aller, je suis tout de même un peu sceptique sur mon éventuelle reconversion et surtout, sur sa légitimité. M’enfin, on va pas tergiverser trop longtemps. Autre principe ici : saisir toutes les opportunités. Le rendez-vous se passe super bien, j’accroche à fond avec le principe de l’association. Et puis comme l’année se termine fin mai, ça me laisse trois mois pour essayer. Période d’essai tout à fait acceptable et il me reste plein de temps à côté pour continuer mon yogi-yoga et voir mes copines.
Un grand classique du cinéma américain
J’assiste vite fait à un cours « pour voir », et je me dis : faisable. J’ai sans doute eu un excès de confiance en moi sur ce coup-là… Deux jours plus tard, je me retrouve dans une classe de petits qui ont, à vue d’œil, entre 5 à 7 ans. Je ne me contente pas d’observer la classe depuis ma mini-chaise pour nain de 1 mètre de haut, je dois vraiment aider.
Les élèves qui ont fini leur travail se regroupent sur un tapis, et moi je dois leur raconter une histoire. Sauf que les enfants ne tiennent pas en place, ils se roulent par terre, ou veulent tous s’asseoir sur la même chaise. Je choisis au pif un magazine, les enfants plus ou moins assis en cercle en face à moi. Je commence l’histoire et je me rends compte qu’il est question d’un petit garçon qui perd son grand-père. Enfin, il est pas perdu dans la forêt, non, il est mort. Merde. Au fil de l’histoire, je dois poser des questions pour m’assurer qu’ils comprennent bien, mais je ne peux pas demander des trucs comme levez le doigt ceux dont le grand-père est déjà mort ou, plus pudiquement, la mort, c’est quoi pour vous ?. Les enfants sont francophones, mais tous ne parlent pas très bien et j’espère qu’ils n’ont pas bien compris. Degré zéro de la pédagogie-psychologie : on évite de parler des problèmes. Bravo moi-même.
En même temps que l’histoire avance, je me rends compte que les enfants commencent à toucher les lacets de mes chaussures, se lèvent, me tournent autour, une petite fille essaie de s’asseoir sur mes genoux. Sans m’en rendre compte, je suis rapidement encerclée par les enfants. Plus moyen de m’échapper, tels de mini-zombies, ils m’assaillent de tous les côtés. Finalement la maîtresse en chef leur dit de s’asseoir. Je suis sauvée. Mais j’ai eu peur, j’ai chaud, je suis mal.
Finalement (et heureusement), je suis affectée dans une classe avec des enfants plus grands, et avec une maîtresse (je sais pas si c’est le terme officiel, mais j’aime bien) super sympa et jeune qui plus est. Les enfants ont 8 ans et pour la plupart parlent bien le français. C’est super bizarre d’ailleurs car ils sont tous francophones, mais comme ils vont à l’école américaine, le français n’est plus du tout naturel pour eux. C’est mignon leur accent et leurs petites fautes. Mais par contre, ils me mettent la misère en anglais (même s’ils n’ont officiellement pas le droit de parler anglais pendant le cours).
En début de cours, on fait une petite routine : quelle est la date, quel temps il fait, qu’est-ce que vous avez lu comme livre/ vu comme film cette semaine ? Lors d’un cours, l’une des filles dit qu’elle a presque terminé de lire The hunger games (je m’entraîne encore avec ma conversation partner pour prononcer le titre correctement). Hystérie collective : les gamins sont fous qu’on parle de ce bouquin, et accessoirement moi aussi, car à l’époque, j’en étais presque à la fin du troisième tome. Je n’avais qu’une peur, c’est qu’ils me dévoilent la fin de l’histoire (ils ont osé, hélas). C’est cool, j’ai le niveau de lecture d’enfants de 8 ans (enfin tout de même ce bouquin est quand même sur comment se tuer les uns les autres, ya quelque chose qui tourne pas rond là !).
Je suis contente avec mes petits élèves, on a même fait une fête de la francophonie samedi dernier (dire que jusqu’à présent, j’associais cet événement à RFI et Jacques Chirac, ça prend un tout autre sens ici…). Et pour bientôt : initiation à la philo et une kermesse. Je vais me proposer pour le chamboule-tout.
13 réflexions au sujet de “Alouette, gentille alouette // Je retourne à l’école”
Bonjour Mathilde,
Je m’appelle Nabila et je tiens d’abord à te remercier pour ton blog qui est super et qui nous aide beaucoup car nous sommes dans la même situation que vous (ou presque ?). Je suis docteure en neurosciences et je vais faire un postdoctorat aux états-unis (au New Jersey plus précisément). On veut du coup partir à 2. Lui n’a pas de promesse d’embauche pour l’instant mais des idées de quoi faire là-bas.
On se demandait quel visa tu avais au moment où tu es partie avec ton chéri ? Est-ce que tu sais s’il faut avoir un visa de travail pour donner des cours de français ?
Merci d’avance pour ta réponse 🙂
Au départ j’avais un visa J2 et j’ai demandé une autorisation de travail EAD (payante)
Il faut toujours un visa qui autorise à travailler pour faire la moindre démarche, mais honnêtement, ça fait trop longtemps, je ne suis plus au fait de tout ça, c’est très compliqué.
Tournez vous vers des forums, maybe le consulat ?
Bonjour,
Je viens de découvrir ton blog qui est tres agréable à lire et qui m’aide à en savoir un peu plus sur les états-unis….
Nous nous expatrions prochainement dans le texas (petite ville près de dallas ) en famille, pour suivre mon mari qui doit être muter là bas…
Je souhaiterai savoir s’il est nécessaire d’avoir un diplome ou un niveau d’étude particulier pour enseigner le français à l’école primaire ? Pour des remplacements par exemples ?
Bonne continuation dans ton parcours !
Hello,
Aucune idée honnêtement, il faut voir directement avec les écoles qui t’intéressent. J’aurais tendance à dire que oui.
Ahah, je n’avais pas lu cet article ! Il était vraiment marrant ! Je suis d’accord pour dire qu’une classe d’enfants, ça fait peur !
« – Emma, retourne sur le tapis!
– Non. j’suis pas un policier j’suis une princesse. »
« bonjouuur monsieur Kimble »
Encore une VHS que j’ai regardée 10 fois 🙂
J’adore cette anecdote franchement! l’image des enfants zombies est PAR-FAI-TE ! Je l avais eu en avant-première au téléphone mais j’ai autant ri!
Tu as oublié : « Ceci est un furet. »
Chapeau bas, encore une fois… J’aurais decede encore plus vite que le grand-pere, assaillie par une horde de mouflets-zombies hauts comme trois pommes ^_^
Ca doit etre une super chouette experience, une fois les premiers effrois passes et surtout une fois les techniques d’assommage de mouflets sus-cites bien maitrisees…
Merci bien. La gestion d’enfants requiert ruse et patience… J’en saurai plus dans quelques semaines.
J’ai bien rigolé et je me suis reconnue dans l' »histoire choisie au hasard dans la bibli mais qui ne conviens pas du tout » hahaha c’est terriblement gênant !
Bonne continuation à toi 🙂
Merci Lucie, contente que ça t’ait plu !
Leçon bien apprise : la prochaine fois je feuilleterai l’histoire avant de me lancer.
Bienvenue dans la grande famille de l’Education Nationale ; )
Merci Margoulette !! Mais famille au sens élargi car l’éducation ici n’est pas vraiment nationale…