Vendredi 4 janvier / Lundi 4 février. Il y a tout pile un mois je faisais une mauvaise chute au sport, j’allais aux urgences et revenais avec des béquilles et une entorse. Au départ, je pensais naïvement qu’après trois jours de repos, de la glace et le pied en l’air, tout redeviendrait normal.
J’avais tort.
Un mois de janvier au ralenti
J’ai bien fait les choses et abimé sérieusement ma pauvre petite cheville devenue monstrueusement gonflée et douloureuse au moindre mouvement.
Après 3 jours, j’en étais toujours au même point. J’ai écrit à mon médecin, elle m’a dit d’attendre, et de « R.I.C.E. » : rest, ice, compress, elevate.
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Etre immobilisée avec des difficultés pour me déplacer m’a forcée à sortir de ma routine de freelance en hiver à Boston. J’aime travailler par moi-même, je chéris cette liberté, mais j’aime cette situation tant que je peux disposer de mon temps à ma guise, rythmé par le sport et les diverses sorties culturelles et professionnelles. Travailler chez moi, j’aime ça, mais en alternance avec d’autres lieux – la bibliothèque, dans les cafés, seule ou avec des collaboratrices, ça aide à la productivité.
Je me suis retrouvée du jour au lendemain, ou plutôt de la matinée à l’après-midi, coincée, tout là haut dans mon petit appartement – que je trouve super cosy et, en temps normal, à la situation idéale, à savoir au dernier étage sans voisin au-dessus. Là haut, je me sentais isolée dans ma tour, façon Rapunzel mais sans les longs cheveux et avec le Prince Charmant qui bosse non stop. Il fallait que je me réorganise, et que – expression détestée – je « prenne mon mal en patience. »
J’avais un rendez-vous un mercredi de lendemain de neige et verglas, et aucune envie de le reporter ou de l’annuler. J’ai appelé un Lyft, assise sur la dernière marche en bas des quatre étages descendus tout doucement avec les béquilles de guerre à l’américaine. Il arrive dans 1 minute, me dit l’app. Je sors, avec précaution, il y a une muraille de neige qui borde le trottoir, je dois aller au coin de la rue pour trouver un passage – passage rempli d’une eau marronnasse boueuse de slush de neige. Je traverse ce marécage, toujours en béquilles, sur un pied. D’ordinaire les chauffeurs de Lyft sont bavards, on cause entorse et sports – j’ai découvert que tout le monde avait une histoire d’entorse à raconter. Celui-ci avait l’air moins coopératif, et m’a laissée devant la bibliothèque où j’avais rendez-vous… devant un tas de neige à franchir. Heureusement les jours suivants il y a eu un redoux étrange couplé d’averses qui ont tout nettoyé. Adios la neige. De retour au temps sec et glacial de l’hiver, beaucoup plus simple à gérer pour personne à mobilité réduite.
Demander de l’aide n’est pas mon fort, et recevoir de l’aide sans rien demander n’est une option que pour ceux proches de parents, je suppose, I can’t relate. J’ai pris l’habitude de me débrouiller toute seule. Mais pour ma survie mentale, j’avais besoin de connections, autrement dit de voir des gens. J’ai demandé, insisté même, pour qu’on vienne me tenir compagnie le soir : il y a eu des soirées films, des soirées où je reste à danser assise dans le canapé, des soirées jeux, une soirée de compétition de soupes – où je me remettais presque à marcher sans trop claudiquer.
Petite pause à mi-parcours
J’en ai parlé dans la newsletter… le jeu de société Dixit
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Petit à petit, j’ai retrouvé de la mobilité, qui n’est toujours pas encore très fluide, mais le quotidien est déjà grandement amélioré sans avoir à se déplacer en béquilles.
Après avoir écrit toutes les semaines de janvier à mon médecin, elle m’a enfin dit que je pouvais prendre rendez-vous chez la kiné, la physical therapist – la même que j’ai vue ces dernières années pour tantôt un dos bloqué, et une élongation du mollet.
Comment comparer le kiné en France du kiné aux Etats-Unis ?
Mon père était, il est toujours d’ailleurs, kiné, et j’avais l’habitude quand j’étais petite d’être soignée à la carte par lui quand j’en avais besoin.
La kiné que je vois à Boston travaille dans un centre de soins rattaché à un hôpital de la ville, qui fait partie de mon réseau d’assurance. Une séance coûte 170$ ; et je paie 15$ de copay. J’ai besoin d’une ordonnance, fournie par mon médecin pour y aller : histoire lambda.
C’est ma kiné chouchou qui m’accueille quand j’arrive à mon premier rendez-vous, légèrement en retard – j’ai encore un peu de mal avec les déplacements en béquilles. « Je ne pensais pas te revoir si tôt ! » Elle est accompagnée d’une étudiante en dernière année d’études qui l’assiste. On va dans une petite salle fermée avec des affiches d’anatomie.
La première séance dure environ une heure, c’est la visite « d’assessement« , d’évaluation, où elles regardent les radios faites aux urgences, l’étudiante prend des mesures, me pose plein de questions. La kiné me dit que je peux laisser tomber les béquilles – que je peux donner à une bourse de charité une fois par an. « Vous pouvez marcher, mais pas plus de 5 minutes par jour. » Alors que je boitille encore, je lui demande si je peux faire du vélo pour me déplacer, en me disant que l’effort est différent et peut-être plus adapté dans ce cas « Non, on va encore attendre un peu pour ça. » Elle me donne une fiche d’exercices à faire chez moi. On se revoit quelques jours plus tard pour voir mes progrès.
Et c’est parti pour plusieurs semaines de rééducation, à base de plié-déplié de bout de pied.
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12 réflexions au sujet de “Un mois de janvier au ralenti : la vie de freelance immobilisée”
Coucou Mathilde,
Je n’avais pas pris le temps de te laisser un petit message ici, mais j’espère que ta rééducation se passe bien et que tu retrouves ta « mobilité ». PS: je voulais te remercier pour tes conseils lecture, je dévore Educated, thanks.
Bonne semaine
Jessica
Merci Jessica ! merci pour ton petit mot, et oui ça va de mieux en mieux ! trop bien pour Educated, j’avais beaucoup aimé, je l’ai prêtée à une copine et il vit sa vie de livre indépendant maintenant 😀
Bonjour Mathilde,
pour ma part, l’an dernier, je me suis cassé un bras (fracture déplacée nécessitant opération) alors que je m’apprêtais à être prof de yoga à temps complet. Hum. Heureusement que j’avais prévu de prendre de longues vacances avant de retravailler… j’ai mis 3 mois à pouvoir refaire à peu près toutes les postures et 4 mois avant d’avoir vraiment récupéré à 100%. Ce fut difficile, mais j’ai essayé d’en tirer parti un maximum, en lisant beaucoup, en randonnant, etc… Et ça m’a permis de réapprendre des choses, et ça c’est toujours intéressant. Bon courage à toi !
Pas cool comme accident…
Courage courage !
thanks !
c’est vrai que le système de santé aux Etats Unis est à connaitre par les français qui se plaignent en permanence de notre système de santé.
Rien que le fait de rentrer aux urgences et de ressortir sans rien payer, beaucoup d’étrangers auraient souhaité avoir la même chose.
nous avons encore cette chance d’être très bien soignés en France et d être bien pris en charges.
croisons les doigts pour préserver tout ça.
prenez soin de vous à très bientôt sur votre blog
merci ! et oui, le système français est à préserver
Ma vie de freelance est toute jeune, même pas un an. Et nous sommes partis faire un grand voyage autour du monde en plein milieu, alors la routine, je la cherche encore un peu. Les débuts ont été un peu difficiles à gérer et j’ai pris du retard. Ce qui m’a aidée j’avoue c’est que mon mec commence à suivre des MOOCS et qu’on ait tous les deux besoin de périodes de travail. Ceci dit, je note que je suis plus productive seule. Je consacre le matin à l’écriture et l’après midi à des tâches moins « intellectuelles » comme le démarchage, le réseautage etc…
Bon courage (et bonne patience) pour ta rééducation !
Cool pour la vie de freelance, tu fais quoi comme job ?
Bon moi j’y suis habituée depuis plusieurs années, mais là c’était une première l’immobilisation forcée de semi-longue durée, et ça remet pas mal de choses en branle si je puis dire
A+ dans le bus
Bonjour, et bon courage pour la physio. En Suisse, les béquilles on les loue à la pharmacie. Aors un jour, à coups d’entorses et de blessures au pied de ma douce moitié, je les ai carrément achetées à la pharmacie, ça vaut une petite cinquantaine de dollars. Finalement, c’est inusable, ça évite de courir en louer à chaque bobo et bien rangées dans le placard à balais elles ne dérangent personne.
Est-ce que ton médecin t’a fait mettre une attelle ? un truc qui se passe autour de la cheville, s’adapte par pressions d’air et stabilise très bien la cheville. Permet de marcher sans danger. Ici, le traitement typique, c’est une semaine de repos le temps que ça dégonfle puis marche normale avec l’attelle pour éviter l’ankylose, du coup physio très limitée. Autre continent, autre technique.
Bon courage
Merci Marie pour les encouragements !